TVNC : Normandie, d'actions et d'infos









Inscription à la newsletter




Partager ce site

Courrier mensuel de l'Office de Documentation et d'Information de Normandie

Dimanche 10 Mars 2019

Sous les sabots de Sleipnir, le coursier d'Odin…
Actualités normandes du mois de février 2019



Au moment où la Normandie agricole tient son rang – l’un des plus prestigieux – au Salon International de l’Agriculture, à Paris, on apprend la prochaine fermeture de la sucrerie Saint-Louis -Sucre, filiale française du groupe allemand Südzucker, à Cagny dans le Calvados.

Sucrerie située le plus à l’ouest de l’Hexagone, Cagny avait en grande partie récupéré la clientèle des betteraviers normands depuis la fermeture de la sucrerie de Nassandres, dans l’Eure. Il ne reste plus en Normandie que la sucrerie d’Etrépagny (jusqu’à quand ?). Cette déroute sucrière a une double origine : la concentration des industriels du sucre dans des consortiums européens – en l’occurrence allemand – qui ne voient en un terroir qu’un lieu commode d’exploitation parce qu’on y trouve une production betteravière importante et non pas l’émanation naturelle d’une vocation enracinée de la culture de la betterave à sucre… L’autre cause (les deux sont concomitantes) réside dans la logique libérale européenne de la fin des quotas qui régularisaient la production dans des limites définies permettant aux betteraviers de se projeter dans l’avenir avec des revenus prévisibles. La fin des quotas a signifié la production à tout va, même là où ce n’était pas la vocation première des terres riches favorables à cette culture. S’en est suivie une surproduction et, bien entendu, une baisse des prix de vente du sucre, notamment à la sortie des usines à sucre… Un opérateur comme Südzucker a donc tout intérêt (ou la nécessité) de resserrer son dispositif et, par suite, de se replier sur ses usines allemandes (plus proche de la Pologne, nouveau producteur betteravier depuis la fin des quotas)… Et c’est Cagny qui est sacrifiée.

Le député Alain Tourret (Cagny est dans sa circonscription) a tout à fait raison de déplorer la fermeture de la sucrerie et d’énoncer ce qui ressemble à un truisme : « Un peu de l’agriculture normande est menacé ». Eh oui ! La fin de Cagny signifie pour tout l’ouest de la France en général et la partie centrale de la Normandie en particulier l’abandon programmé de la culture de la betterave à sucre dans cette partie du territoire, c’est-à-dire une remise en cause des assolements dans les campagnes céréalières où la betterave alternait lucrativement avec les céréales et autres protéagineux. C’est donc un équilibre productif qui est remis en cause.

Ce désastre agro-industriel ne sera pas sans conséquences sur la ferme normande… au moment où, seconde mauvaise nouvelle, on apprend (cf., le journal Les Echos) que, du fait du boycott imbécile de la Russie selon l’oukase américain, le pays de Vladimir Poutine s’est réveillé et devient le premier exportateur de céréales dans le monde : le port de Rouen vient d’être détrôné comme premier port exportateur de céréales en Europe et son avenir, en ce domaine, est certainement compromis…

Alors, remise en cause de la culture de la betterave et menaces sur les exportations de céréales, la Normandie agricole voit son avenir s’assombrir.

Certes, et le journal L’Eure agricole et rurale (24 janvier) a raison de tabler sur les « céréales : enjeu de géopolitique », laissant entendre que la croissance exponentielle des populations asiatiques et africaines nécessitera de plus en plus de céréales disponibles… Mais avant que cette occurrence s’avère, l’agriculture normande va devoir affronter une période de... vaches maigres. L’image est de circonstance : l’élevage en Normandie n’est peut-être pas au mieux de sa forme. Il est si fragile que certaines exploitations transforment nos prairies en champs emblavés et… betteraviers. Le serpent se mord la queue !

Les succès de la représentation normande au Salon de l’Agriculture qui sont un hymne à l’excellence normande seront-ils suffisants pour conjurer les menaces qui pèsent sur la ferme normande ?

 

EN ATTENDANT, CELA BOUGE ENCORE DANS LE MONDE AGRICOLE NORMAND ET DANS L’AGRO-INDUSTRIE NORMANDE…

 

L’hebdo La Manche Libre (23 février) consacre une page au fait que « L’agriculture bio s’envole en Normandie ». Depuis 2015, dans la Manche et le Calvados, cultures et élevages biologiques connaissent une croissance annuelle à deux chiffres. Certes, ce secteur est assez massivement aidé, par la Région notamment, (64 millions d’euros d’aides depuis 2015) car le passage au bio suppose une transition très accompagnée, mais le résultat est là : « Avec le bio, les revenus sont convenables », reconnaissent cultivateurs et éleveurs. Les exploitations bio représentent dans la Manche et le Calvados 6,4 % de l’ensemble – dans la moyenne nationale, donc - sans doute moins dans l’Eure, l’Orne et la Seine – Maritime, mais la progression y est sensible.

L’entreprise Isigny-Sainte-Mère investit dans nouveau et très moderne laboratoire d’analyses – pour les laits infantiles –, dont les produits sont mondialement exportés. L’excellence paie !

Les à-côtés de l’agriculture ne sont pas à négliger : la Région encourage fortement la méthanisation en milieu agricole. Un grand projet de méthaniseur, à Isigny-sur-Mer, (SAS Énergie Digard and co, en liaison avec la SCEA du Wigwam et l’EARL de la Hatainerie) devrait fournir plus de 700 000 m³ / an, soit l’équivalent électrique de plus de 700 foyers… C’est, en outre, une moindre émission de 1995 tonnes de dioxyde de carbone… Une vraie énergie renouvelable non intermittante ! Les fonds européens FEDER participent pour un cinquième à cet investissement.

Le Pôle de compétitivité du Grand Ouest, VALORIAL, recouvrant la Normandie (avec Pays de la Loire et Bretagne), qui regroupe 360 industriels, centres de recherche et établissements de formation, va se rapprocher de son homologue AGR-SUD-OUEST innovation… dans le but de trouver de nouveaux débouchés. Acceptons-en l’augure ! Mais la gouvernance de l’ensemble (où la Normandie, à notre avis, n’est pas suffisamment partie prenante) échappera encore davantage aux opérateurs normands. Méfie-té, méfie-té co, méfie-té tréjous !

 

Nous ne nous étendrons pas sur les succès de la filière équine (un bonheur pour tout observateur normand !), mais nous soulignerons, là encore, les à-côtés d’un secteur qu’il faut apprécier dans sa diversité :

  • Les étalons de sport de la race Selle français ont paradé au Haras de Saint-Lô, intéressant un public d’éleveurs en vue de saillies.
  • Une éleveuse de pur-sang, Camille Vercken, publie sa première B.D. hippique, chez Glénat.
  • Les selliers d’Hermès vont se former au Haras du Pin.
  • Hippocenter, à Saint-Paul du Verney, leader français du matériel d’entraînement et de soins aux chevaux innove dans de nombreux domaines et vise l’international.
  • Arquana, à Deauville, a mis aux enchères des embryons qui sont partis vers New-York, Hong Kong et, évidemment, vers les haras normands. 

Enfin, et nous en aurons terminé avec le secteur agricole qu’il était juste de mettre en évidence en ce début d’année, il faut rendre compte des résultats des élections aux Chambres d’Agriculture.

En Normandie, c’est le « grand chelem » pour les listes FNSEA-JA (dixit Ouest-France) qui remportent 65,18 % dans l’Eure, 55,91 % en Seine-Maritime, 47,59 % dans l’Orne, 47,10 % dans le Calvados et 49,72 % dans la Manche. La FNSEA reprend la direction de la Chambre d’Agriculture du Calvados à la Coordination rurale (Scores : 35,40 % dans le 14, 25,81 % dans le 76, 25,19 % dans le 61, 20,45 % dans le 27 et 24,07 % dans le 50. La Coordination rurale, cependant, progresse et, globalement, devance nettement la Confédération paysanne qui, pourtant, a une faveur exagérée de la presse et des milieux branchés.

Pour en terminer avec ces élections professionnelles, notons cependant une baisse de dix points de la participation (60 % d’abstentions) qui, indiscutablement, traduit un malaise du monde agricole (N’en est-il pas de même dans les autres élections professionnelles… et politiques ?).

 

NOUVELLES DE LA SOCIÉTÉ NORMANDE

 

Dans ce chapitre, à dire le vrai un peu fourre-tout, nous traitons aussi bien de toutes les formes d’insécurité (sanitaires ou civiles) que de l’évolution de l’opinion, notamment au travers des médias ou des préoccupations spirituelles (différents cultes et écoles philosophiques) : c’est l’actualité qui nous donne l’occasion de faire des commentaires.

Au plan de l’insécurité autre que sanitaire, nous relevons que, comme chaque année, des unités de différentes marines de l’O.T.A.N. font la chasse aux mines sous-marines en Manche, restes toujours dangereux des deux dernières guerres mondiales. Nos pêcheurs se retrouvent quelquefois avec ces divers engins de mort dans leurs filets… Ces derniers jours, à la T.V. nationale, on nous en a fait toute une pendule sur la découverte et la neutralisation d’une bombe américaine dans la banlieue parisienne… Un de nos correspondants nous a fait remarquer qu’il ne se passe pas de mois, en Normandie, où des artificiers n’interviennent : notre région a eu le « privilège » d’être particulièrement « soignée » par les bombardements « libérateurs »… et cela fait bientôt 75 ans que la Seconde Guerre mondiale est terminée ! Un journal – que nous ne citerons pas par indulgence – parle de « la poule aux œufs d’or » des commémorations de la Bataille de Normandie : la formule est osée, voire dérisoire, aux yeux des habitants qui étaient sous les bombes. Il y en a encore qui se souviennent, même si les rangs s’éclaircissent…

Au plan de l’insécurité sanitaire, les inquiétantes statistiques montrent que la Normandie est l’une des régions les plus touchées en France par le cancer. La présence de centres anti-cancéreux performants, à Caen comme à Rouen, est une réponse adéquate et la région doit se mobiliser (autorités et société civile) pour leur accorder encore plus de moyens.

La Ministre de la Santé a confirmé la prochaine fermeture de la maternité de Bernay : est-ce ainsi que l’on encouragera un dynamisme démographique équilibré sur tout le territoire normand ?
 

Dans le domaine médiatique, nous avons à déplorer – le mot n’est pas trop fort : c’est un échec collectif que la cessation de paraître d’un journal – la disparition des Affiches de Normandie, journal d’annonces légales qui nous réservait souvent des articles culturels de bonne tenue – et du magazine des chambres de Commerce et d’Industrie de Normandie, Normandynamik… pour des raisons de restrictions budgétaires liées aux moindres dotations de l’État.

 

Enfin, et surtout, la récente publication de l’étude sur les Normands et la… Normandie (in Paris-Normandie, 20 février 2019), réalisée par un cabinet d’études pour l’Institut Montaigne, nous livre des renseignements intéressants :

  • 75 % des Normands se disent heureux de vivre en Normandie et 68 % estiment qu’il fait bon y vivre… Voilà qui en bouchera un coin à ceux qui, à la T.V. nationale, donnent souvent dans le « Normandie bashing ». Ce qu’aiment les Normands dans la Normandie : les paysages ! Ce qui les gênent : la faillite des transports ! Ce qu’ils déplorent : la disparition des services publics – hôpitaux, écoles, bureaux de postes, services sociaux…
  • Les Normands craignent le chômage (59 %), la baisse du pouvoir d’achat (53 %)… 42 % des Normands estiment que leur situation financière s’est dégradée. Est-il utile de chercher des causes à la crise dite des Gilets Jeunes ?

En tout cas, sans doute pouvons-nous tirer quelques conclusions : les Normands sont mécontents de l’État qui n’est pas à la hauteur de leurs attentes et ils sentent confusément que la Normandie, au travers de ses institutions de proximité, constitue le bouclier social qui, seul, peut les protéger.

 

SUR LE PLAN ÉNERGÉTIQUE ET ENVIRONNEMENTAL, ON DOIT ÊTRE À LA VEILLE DE NOMBREUSES ÉVOLUTIONS

 

Rappelons qu’à l’origine du mouvement des Gilets Jaunes, transition énergétique et transition écologique constituaient l’arrière-plan – confus – de la contestation. Nous évoquerons des faits – disparates – qui devraient éclairer le débat

  • Une vigoureuse critique de l’éolien (cf. Le Figaro du 8 février).
  • La certitude que le charbon, pourtant décrié, reste la première source d’énergie dans le monde (pour nous, en Normandie, se pose la reconversion de la centrale thermique du Havre).
  • La France a battu son record d’exportation d’électricité, essentiellement d’origine nucléaire, du fait de la non – production de l’éolien en cette période de haute pression atmosphérique.
  • Cela démontre la nécessité du nucléaire… Est-il étonnant que l’opérateur E.D.F. émette l’idée de créer 2 E.P.R. à Penly ? Cela va déclencher des polémiques : on en reparlera !
  • Cela justifie les projets d’interconnexion entre la Grande-Bretagne et la Normandie. Deux arrivées de câbles, l’un à Merville-Franceville, l’autre à Pourville. Malgré les protestations de certains, il est prévisible que ces projets se réaliseront.
  • La Région (voir plus haut) s’engage à fond vers la méthanisation agricole.
  • Elle met 11 millions d’euros dans l’hydrogène vert (Ergosup).
  • La vocation énergétique de la Normandie reste évidente.

Du côté environnemental, nous avons relevé que l’Agence de l’Eau Seine-Normandie allait resserrer ses aides… Ques aco ? Cela veut-il dire que les coûts engendrés par l’arasement des barrages du Sud Manche et qui seront en grande partie à la charge de la dite Agence de l’Eau vont limiter ses interventions dans d’autres domaines ? Les collectivités locales, directement concernées, se posent des questions. In fine, ce sont les citoyens qui régleront la note sur leurs factures d’eau !

 

LE BREXIT SE RAPPROCHE, LE MONDE DE LA MER S’INQUIÈTE…

 

Cela nous vaut des visites ministérielles, avec des promesses : plus de douaniers, dit Lecornu. 75 postes nouveaux seront pourvus pour toute la Normandie. Sera-ce suffisant ? Quid de l’engorgement des camions sur nos quais ?

Le monde de la pêche est de plus en plus inquiet, malgré les lénifiantes déclarations ministérielles.

Pourtant, l économie maritime réserve des satisfactions qu’il ne faut pas bouder :

  • L’Australie vient de signer le fabuleux contrat de constructions de sous-marins, dont une partie importante sera réalisée à Cherbourg. Des familles de cadres et techniciens australiens viennent s’installer dans la capitale du Nord-Cotentin.
  • Croisières et plaisance sont dans le vent à Honfleur (Port de Rouen).
  • Les autorités sont décidées à tout faire pour la restauration du fort de l’île de Saint-Marcouf.
  • Ne revenons pas sur la reconnaissance I.G.P. du « Bulot de Granville ».

 

LE FAUX DRAME DE LA FUSION DES ACADÉMIES DE NORMANDIE

 

Les syndicats enseignants dénoncent la fusion programmée des académies de Caen et de Rouen.

On manifeste, on proteste énergiquement, on énergie protestement, on pétitionne, on anathémise, on bloque symboliquement les entrées des rectorats, bref, tout le folklore habituel de la corporation en pleine crise de… corporatisme.

De quoi s’agit-il ? De la reconstitution d’une Académie de Normandie sur cinq départements et de la fin d’un système qui consistait à envoyer les élèves des établissements des deux académies à des moments différents lors des vacances intermédiaires. Pour ce type de service public d’État, est-il si scandaleux de rationaliser quelque peu une administration peut-être pléthorique ? Il ne s’agit, en effet, que de déplacer quelques chefs de service de Rouen à Caen et vice – versa, car, et l’évidence est soigneusement omise dans la littérature syndicale – la quasi-totalité des agents des rectorats actuels de Rouen et de Caen resteront en place et la gestion des personnels des collèges et des lycées sera aussi décentralisée qu’avant.

Le plus extraordinaire, c’est que les syndicats protestataires invoquent une néfaste (sic !) « exception normande » pour justifier leur courroux. La Normandie serait la seule Région à n’avoir qu’un rectorat (c’est faux : ex la Bretagne)… Ces messieurs-dames de la contestation syndiquée semblent ignorer l’énorme différence entre une région cohérente, de taille humaine, la Normandie, avec les autres nouvelles régions disparates comme Grand Est, Nouvelle Aquitaine, Auvergne Rhône-Alpes. En fait, ce qu’ils veulent ignorer, c’est la logique même de la réunification normande, indiscutable réussite des lois de 2015.

 

IL Y AURAIT ENCORE TANT DE CHOSES À RELEVER…

 

Un mois de Normandie, c’est considérable et, au risque de lasser nos lecteurs – car beaucoup de thèmes reviennent de mois en mois –, nous serons brefs ou même cois sur certains sujets que, pourtant, notre équipe a documentés. En tant que responsable de cette chronique, je sabre ! Ou je reporte à plus tard l’évocation des dossiers toujours brûlants et qu’on retrouvera les mois prochains.

Quelques faits remarquables cependant (en désordre et de façon tout à fait subjective) :

  • Les monnaies locales s’implantent lentement. Il n’y a pas que le Rollon régional.
  • Les aéroports normands connaissent un certain développement : deviendraient-ils rentables ?
  • Toujours des polémiques ferroviaires sur la ligne Caen – Tours ou sur la suppression de haltes dans certaines gares dans le Pays de Caux sur la ligne Paris – Le Havre.
  • Le Pôle de compétitivité Move’o devient Mobility Valley : cette évolution méritera d’être expliquée.
  • Le Conseil régional est présent sur tous les fronts, mais ce n’est pas nouveau. Il faudra dresser le bilan de son action en juillet prochain après trois et demi de mandature…

Nous terminerons notre chronique en nous réjouissant de la réception à l’Académie française de l’écrivain normand Patrick Grainville. Encore un Normand distingué !


Guillaume LENOIR

avec l’aide de Geneviève FLAMENT, Thierry LANGLOIS,

Edwige LE FORESTIER et Emma DAVESNE

 

OFFICE DE DOCUMENTATION ET D’INFORMATION DE NORMANDIE

87, rue de la République

76940 La Mailleraye sur Seine

Commune nouvelle d’Arelaune en Seine


La Rédaction